02 février 2012

fin chapitre 2 conte d'automne : Je Moi Surmoi ... Et Oedipe

Par Martine Assandri 


Si Lucas, par son attitude, remet en cause le fonctionnement de l’établissement, le provoque, le met à mal, au-delà  il remet en cause le fonctionnement des relations familiales,  renvoyées et mises à l’épreuve, par le biais de l’impossible intégration scolaire.
Ce bouleversement est profond, déstabilisant. Il remet en cause ses parents, le fonctionnement antérieur, vient bousculer les certitudes. Lucas confie, très bas, en pleurant : « Mes parents… ils s’en foutent de moi », comme un petit enfant.

Le fait de susciter l’attention, de mobiliser les équipes, d’alerter la famille, nous alertent sur une impossibilité de Lucas à passer par la parole, d’exprimer une difficulté particulière, inconsciente. Il s’agit alors de mettre en lumière cette ambivalence de Lucas, qui souhaite tout à la fois grandir mais rester enfant. Ce moment de crise montre l’angoisse de cet adolescent de se séparer tout en revendiquant un statut de personne, de sujet.
Pour Lucas, ce passage s’avère donc particulièrement difficile et le renvoie à ses difficultés à devenir « grand ». Il est à rapprocher de la constitution du Surmoi qui occupe Lucas à différents niveaux inconscients. Freud émet l’hypothèse que chacun rêve à une jouissance absolue, symbolique :

"Œdipe et le Sphinx"  dictionnaire décembre Alonnier

•    de possession de la mère
•    de meurtre du père
•    et dans le même temps, d’identification à ce  père tout puissant et idéal, à la fois craint et haï.

Lucas est soumis à ces mouvements pulsionnels. Il tente de réagir à cette situation insupportable, qui réactive le conflit œdipien et le risque incestuel fantasmé, de façon inconsciente.
Dans cette tentative d’y échapper, il place l’Autre, le Surmoi, comme rempart à cette angoisse qui l’envahit, à trouver des limites et des bornes à la situation familiale, qui favorise cette illusion. Il tente de s’affirmer en tant que Sujet; à sortir de la culpabilité que lui apporte sa place au sein de la famille, symboliquement mais aussi matériellement, tant la relation mère/fils est forte , dévorante.

Les passages à l’acte peuvent être lus comme des tentatives de « pacifier sa culpabilité » (1, vous pouvez lire un très bel édito de J.M.  Vivès ici ), et la possibilité de pouvoir aborder ces questions avec lui, de permettre de les penser avec lui.
Le père de Lucas semble avoir du mal à se positionner comme « barrage » à ce fantasme de possession absolue de la mère, malgré les tentatives de Lucas de le remettre dans le jeu. Il utilise également  un « Autre » extérieur, l’Ecole, et leur fait jouer ce rôle de garant de la loi symbolique, nécessaire à son accession à l’autonomie, à la possibilité de s’éloigner de la mère. Il tente de redonner une place au père, tout en voulant le démystifier. A la lumière de la psychanalyse, l’établissement et les adultes face à lui,  trouvent donc une place essentielle pour Lucas, dans sa constitution du Surmoi et sa volonté d’autonomisation.

Qui ne le connait pas ? "Le petit prince " de St Saint-Exupéry


                                                                           Suite et fin la prochaine fois ...
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(1) VIVES J.M., Cours de psychologie "Lois et violence" du 06/06/2009, D.U. Penser le travail social, Université de Toulon et du Var


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