09 avril 2008

Chapitre 7 suite

7-4 Les doubles contraintes thérapeutiques

Prescrire le symptôme n'est qu'une des formes possible des multiples et différentes interventions paradoxales regroupés sous l'expression « double contraintes thérapeutiques ».
Au point de vue de la communication , les communications paradoxales sont les interventions les plus complexes et les plus efficaces en valeur curative des communications paradoxales. C'est le moyen de briser une double contrainte symptomatique par une « contre double contrainte » et également instaurer un « contre jeu » dans un jeu sans fin.
Ce qui a rendu quelqu'un fou doit être utilisable éventuellement pour le rendre sain d'esprit.
Les qualités humaines du thérapeute sont nécessaires et utiles dans une psychothérapie mais ne suffisent pas à elles seules pour débrouiller la complexité paradoxale d'une interaction perturbée.
Du point de vue structurel, une double contrainte thérapeutique est l'image en miroir d'une double contrainte pathogène.
Elle présuppose l'existence d'une relation intense, avec le thérapeute, dont il attend beaucoup. (valeur vitale)
Dans ce contexte, on formule une injonction dont la structure est telle qu'elle renforce le comportement que le patient s'attend à voir changer. Elle implique que ce renforcement est le véhicule même du changement, il y a création d'un paradoxe puisqu'on demande au patient de changer en restant inchangé. Dans une double contrainte pathogène, le patient est « condamné s'il le fait et condamné s'il ne le fait pas », dans une double contrainte thérapeutique, le patient « change s'il le fait et change s'il ne le fait pas. » Logiquement, l'injonction est absurde, elle a néanmoins une réalité pragmatique; le patient ne peut pas ne pas y réagir, mais il ne peut pas non plus y réagir selon son mode habituel, c'est-à-dire par ses symptômes. Une double contrainte thérapeutique oblige toujours le patient à sortir du cadre que lui fixe son dilemme. Ce pas est possible lorsque le système primitif est élargi en un système plus vaste comprenant un étranger, bien sur, spécialiste. Il est alors possible pour tous les intéressés de regarder l'ancien système de l'extérieur et on peut introduire des métarégles que l'ancien système ne pouvait engendrer lui-même de l'intérieur.

7-5 Exemples de doubles contraintes thérapeutiques

En discutant la théorie de la double contrainte, il a été dit que le paranoïaque, dans sa quête minutieuse du sens, va souvent jusqu'à faire passer au crible des phénomènes totalement secondaires et sans rapport entre eux, puisqu'il a été mis dans l'impossibilité de percevoir et de critiquer correctement le véritable problème ( le paradoxe). Alors que le patient prend des airs distants et entendus, il souffre en réalité de « trou » énormes dans son expérience réelle, et l'injonction répétée d'avoir à se méfier d'une perception correcte a un double effet: elle empêche le patient de combler ces « trous » avec une bonne information et elle renforce ses soupçons. Avec le concept de communication paradoxale, on peut « apprendre au patient à être plus méfiant ». Par exemple suggérer au patient d'explorer le cabinet du thérapeute pour s'assurer qu'il n'y a pas de micros cachés, avant de poursuivre la séance. Ceci donne l'illusion au patient « l'illusion du choix possible ». Ou bien il accepte l'exploration proposée ou bien il abandonne ses idées paranoïaques.

Non seulement la situation psychanalytique, mais aussi la plupart des situations psychothérapeutiques, abondent en doubles contraintes implicites. Un des tout premiers collaborateurs de Freud, Hans Sachs, s'est aperçu de la nature paradoxale de la psychanalyse; d'après lui: « une analyse se termine quand le patient se rend compte qu'elle pourrait continuer indéfiniment. » Cette formule rappelle l'un des dogmes du bouddhisme Zen, qui veut que l'illumination surgisse quand le disciple comprend qu'il n'y a pas de secret, pas de réponse définitive, et donc aucune raison de continuer à poser des questions.

Énumérons quelques-uns des paradoxes en situation psychanalytique:
* Le patient voit en son analyste un spécialiste qui ne manquera pas de lui dire ce qu'il doit faire. L'analyste répond en renvoyant le patient à lui-même, en le rendant responsable du déroulement du traitement, et en lui demandant d'être spontané, tout en fixant des règles qui circonviennent entièrement le comportement du patient. Cas ou l'on dit au patient: « soyez spontané ».
* Le patient se trouvera toujours en présence d'une réponse paradoxale. S'il remarque qu'il ne voit pas d'amélioration, cela tient à ses résistances, c'est une bonne chose, cela fournit l'occasion de mieux comprendre son problème. S'il dit constater une amélioration,on dira qu'il résiste en tentant « la fuite dans la santé », avant que son problème réel n'ait été analysé.
* Le patient se trouve dans une situation ou il ne peut pas se comporter en adulte, et pourtant l'analyste interprète son comportement de type infantile comme un comportement inadapté.
* Autre paradoxe, la relation analytique est-elle volontaire ou obligatoire? D'une part, elle est volontaire, donc symétrique, mais au moindre retard ou absence de séance, la relation devient obligatoire, complémentaire, l'analyste occupant la position « haute ».
* Cette position « Haute » de l'analyste est évidente lorsqu'on aborde le concept de l'inconscient. Si le patient rejette une interprétation, l'analyste peut toujours dire qu'il ne fait que souligner quelque chose que le patient ignore, par définition, puisque c'est inconscient. Si par contre,le patient tente de se réclamer de l'inconscient, l'analyste peut rejeter cette proposition considérant que si c'est inconscient, le patient ne peut s'en prévaloir.
On voit donc que la situation psychanalytique est par elle-même une double contrainte thérapeutique complexe dans laquelle le patient « change s'il le fait et change s'il ne le fait pas ». Cela est également valable plus largement pour toute psychothérapie.

Les médecins sont censés guérir. Dans l'interaction ils se trouvent placer en position « haute ».Plus le traitement réussi, plus leur position est « haute ». Mais, si leur efforts échouent, les positions sont inversées, cet le malade qui occupe la position « haute ». Dans la relation médecin-malade, le médecin risque de se laisser prendre dans une double contrainte par des malades, qui pour des raisons obscures, ne peuvent accepter une amélioration,pour eux, l'important c'est d'occuper la position « haute » au prix même de la douleur et de la gène. Tout se passe comme si ces malades, à travers leurs symptômes, transmettaient ce message: « Aidez-moi, mais je ne vous laisserai pas m'aider ».

Un couple demande une aide en raison de scènes trop fréquentes. Au lieu de centrer son attention sur une analyse de leurs conflits, le thérapeute donne une nouvelle définition de leurs disputes en leur disant qu'en réalité ils s'aiment, plus ils se disputent, plus ils s'aiment. Le couple a beau trouver cette interprétation ridicule , ou précisément parce qu'elle leur paraît ridicule, mari et femme se mettent en devoir de prouver au thérapeute qu'il se trompe complètement. Aussi ils cessent leurs disputes, pour prouver qu'ils ne s'aiment pas. Mais lorsqu'ils cessent de se disputer, ils découvrent qu'ils s'entendent beaucoup mieux qu'ils ne le pensaient.

L'effet thérapeutique de la communication paradoxale n'est nullement une découverte récente. C'est ce que montre une histoire du bouddhisme Zen qui contient tous les éléments d'une double contrainte thérapeutique:
Une jeune femme qui allait mourir dit à son mari:
- Je t'aime tant que je ne veux pas te perdre. Ne me trompe pas avec une autre femme. Si tu le fais, mon fantôme viendra te hanter et ne te laissera jamais en paix.
Lorsqu'elle fut morte, son mari respecta son souhait pendant trois mois, mais ensuite il s'éprit d'une autre femme et se fiança avec elle. Dés ce jour-là, un fantôme lui apparut chaque nuit, lui reprochant de n'avoir pas tenu sa promesse. Ce fantôme savait beaucoup de choses: il disait à l'homme tout ce qui se passait entre sa fiancée et lui. Chaque fois que l'homme offrait un présent à sa fiancée, le fantôme le décrivait en détail, et il répétait chacune de leurs conversations. L'homme en était à ce point agacé qu'il en perdit le sommeil. C'est alors que quelqu'un lui conseilla de soumettre son problème à un maître du Zen qui vivait prés du village.
Ton ancienne femme est donc devenue un fantôme, et elle sait tout ce que tu fais, tout ce que tu dis ou offre à ta bien-aimée? dit le Maître. Ce doit être un fantôme très instruit, et que tu devrais admirer. La prochaine fois que tu le verras, propose-lui un marché. Dis-lui que, puisque tu ne peux rien lui cacher, tu rompras tes fiançailles s'il veux répondre à la question que tu lui poseras. Sur quoi tu prendras une grosse poignée de baies de soja et tu lui demanderas combien de baies tu as dans ta main. S'il ne peut te répondre, tu sauras que ce fantôme n'est que le fruit de ton imagination, et il ne viendra plus t'ennuyer.
La nuit suivante, lorsque le fantôme apparut, l'homme le flatta, comme l'avait dit le Maître, de son savoir.
- En effet, répliqua le fantôme. Je sais même que tu es allé voir le Maître du Zen aujourd'hui.
- Puisque tu sais tant de choses, dit l'homme, dis-moi combien de baies de soja j'ai dans cette main.
Il n'y eut plus aucun fantôme pour répondre à sa question.

7-6 Le paradoxe dans le jeu, l'humour et la créativité

Pourquoi les organismes depuis les invertébrés jusqu'à l'homme sont-ils si sensibles aux effets du paradoxe? Il n'y a pas de réponse claire.
Au niveau humain, le paradoxe peut avoir des effets pathogènes mais aussi thérapeutiques. Il existe encore beaucoup d'aspect positifs au paradoxe.
Par exemple : le jeu, « C'est un jeu » exprime une méta communication sur le jeu. Cela signifie: « les actions auxquelles nous nous livrons maintenant ne signifient pas ce que signifieraient les actions qu'elles représentent. »
L'énoncé négatif renferme implicitement un méta énoncé négatif.
En ce qui concerne l'humour c'est le même principe entre le réel et l'irréel. Le réel est irréel et vice et versa.
Le dénouement final déclenche le paradoxe interne propre au contenu de la plaisanterie. Le paradoxe de la partie négative définit le tout.
La créativité, a fait l'objet de nombreuses études, dont une récente: The Act of Creation d'Arthur Koestler. L'auteur avance l'idée que l'humour et la découverte scientifique, tout comme la création artistique, résultent d'un processus mental qu'il appelle « biassociation », qu'il définit comme la perception d'une situation ou d'une idée sur deux plans de référence dont chacun a sa logique interne mais qui sont incompatibles.
Il établit une distinction entre le raisonnement routinier, la pensée va dans une seule direction, sur un seul plan, et l'acte créateur, sur plus d'un plan, il s'agit d'un état transitoire d'équilibre instable, partagé entre deux directions, le déséquilibre affectant à la fois l'émotion et la pensée. En aucun cas l'auteur considère que la biassociation puisse présenter la structure du paradoxe.

07 avril 2008

groupe de lecture 05 cherche nouvelle lectrice (ou nouveau lecteur)


Collègues, copines, travailleurs sociaux, etc (liste non exhaustive)

Une d'entre nous doit partir vers de nouvelles aventures : une formation sur la COMPLEXITE, plusieurs jours par mois la veinarde...
J'ai nommé Hélène, qui va beaucoup nous manquer mais qui s'est engagée à nous donner des infos régulières sur sa formation...

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NB : Michele, Katherine, Véro, Isa, nous attendons vos résumés des chapitres 5, 7 et 8 d'une 'Logique de la communication..." Publiez directement vos articles sur le Blog (vous êtes contributeurs) !
MA