21 décembre 2008

Journal d'une étudiante : La "menine" de J. CABASSUT.


Lors de son denier cours en novembre, P. PEDRO, dans une de ses envolées lyriques et passionnantes dont il a le secret, nous avait raconté sa fascination devant le génie de Vélasquez, notamment dans sa toile des "Ménines". Les Ménines sont les dames de cour de la petite infante d'Espagne, au départ sujet principal du tableau. Cependant le peintre nous présente également l'entourage de la petite reine.
Parmi les Dames de compagnie, une Naine, Donna Isabel est là dans la composition, à nous dévisager, et à nous inviter à entrer dans le tableau. Par de subtil jeu de dispositions et de miroirs, en effet, d'autre personnages qui ne sont pas acteurs principaux de la scène, apparaissent. L'un -l'artiste- se penche, légèrement dans l'ombre, décalé,et nous contemple. D'autres apparaissent, par leur reflet au fond d'un miroir. Là-bas, derrière la scène, un homme soulève un rideau, y penètre-t-il ou va -t-il disparaitre ?



Quelle ne fut pas ma surprise de retrouver la "Ménina" à ce cours de T.D. de J. CABASSUT ! Mais ici elle ne s'appelle pas Isabel mais Martha...
Tel le peintre, c'est ici le psychologue clinicien qui nous invite à rentrer dans le tableau. Le lieu n'est pas la cour d'Espagne, mais une institution pour handicapés. Et parmi tous les personnages, il y a Martha, qui me fait penser à cette ménine, Isabel. Le peintre, pardon notre prof, nous regarde légèrement ironique : Et bien rentrerez vous dans la réflexion ? Comme le visiteur devant le tableau, je suis spectatrice mais je deviens actrice dans l'exposé de la situation de Martha-Isabel. Elle m'interpelle et nul besoin de paroles de sa part pour aller à sa rencontre, pour réfléchir à la relation établie entre elle et son thérapeute. Et par là même à interroger quelle relation clinique entre une personne et moi-même en tant que professionnelle du social se crée, se met en place et s'élabore. J'accepte l'invitation et je me mets au travail, avec les autres étudiantes ...

Après toutes ces émotions et ces réflexions, nous avons bien besoin des vacances de Noël pour nous remettre, et poursuivre la réflexion !
Alors je vous souhaite à toutes et tous une très belle fin d'année, de bons moments et de belles lectures !

08 décembre 2008

Société en crise / Crise de sociétés.

Cours de P. PEDRO.

La société bouge à grande vitesse, fonctionne au rythme de la finance : il se prépare une crise de l'avenir, il est urgent de la comprendre.

La société se complexifie, on ne peut imaginer les conséquences des décisions prises. Nos relations interpersonnelles transforment complètement nos identités.

Nos ados vivent dans un monde technologique.

La France est une société de statuts, hiérarchisée, datant de l'ancien régime. La société anglo-saxonne a 10 ans d'avance.

Cf. Charles TAYLOR : « Une société fragmentée est celle dont les membres éprouvent de plus en plus de mal à s'identifier à leur collectivité politique en tant que communauté. Cette faible identification reflète peut-être une perspective atomiste qui amène les gens à considérer la société d'un point de vue purement instrumental. Mais la société accentue aussi cette perspective atomiste parce que l'absence de perspective partagée renvoie les gens à eux-même. »

Atomisation : l' atome est incertain, flotte, la société devient liquide, coule.

Existera-t-il encore une société dans l'avenir?

Le droit individuel se développe de plus en plus, alors que le Droit de la famille est remis en cause. Le « chacun son Droit » rompt le lien social, érode la société.

Cf. Michel HOUELLEBECQ : « Les particules élémentaires ».

Le Droit se retrouve aujourd’hui à l'état gazeux, il est flexible : Est-ce encore du Droit?

La société actuelle avance par scandales, par chocs politiques. Notre droit est relié à une culture, le « Droit » est un artifice de langage.

Il existe un « no man’s land » de société où se situe l'adolescence. On ne la comprend pas, ni ne la prenons en compte..

D'après Boris CYRULNICK, soit on décide d'être spécialiste et on cumule des informations sur un point précis ( on sait tout sur ce point mais rien sur le reste), soit on voit un peu partout et on sait rien de précis mais on saisit l'Homme, dans sa complexité.

Actuellement notre vision de l'identité est confondue avec une seule appartenance. Il y a risque de fermeture.

Notre société, composée comme une tour de Babel, est de plus en plus complexe, il y a risque de ne plus se comprendre, cela déclenche une peur réciproque.

3 changements considérable dans les liens qui nous rattachent les uns et les autres.

· Une crise de la relation au temps

Le droit est fondé sur le temps. Pour penser notre société il y a prise en compte du passé, du présent et de l'avenir, mais cela n'est plus articulé. Le temps s'étire en longue durée, les statuts de parent et enfant sont les mêmes à présent.

Que vont vivre nos enfants? Le passé est souvent oublié, devenu incompréhensible, la mémoire est oubliée et il manque le recul du « temps long ».

Le présent est pesant car vécu en temps réel dans une culture de l'immédiateté (mail, portable).

Le futur paraît indiscernable. Gouverner en principe c'est prévoir, mais...

· Une crise de relation à l’espace.

La société rurale a évolué, il n'y a plus que 4% de ruraux, les déplacements sont plus rapides. Avec l'évolution constante, l'espace change, l'espace intergénérationnel également.

En 1968, il y a eu affrontement générationnel, mais maintenant il y a juxtaposition et même concurrence entre plusieurs générations.

Le pouvoir appartient aux individus de 60 à 70 ans et ayant un bon pouvoir d'achat. Il y a peu de dialogue entre les générations.

En banlieue, jeunes et adultes n'ont rien à se dire.

· Crise de la relation à la norme.

Avec la montée de l'individualisme, on veut défendre ses droits, mais chacun essaie de trouver ses propres repères en lui-même. Chacun veut être le chef de projet de sa propre vie et désire une grande liberté.

L'individualisation de la société crée des stratégies sélectives. Dans une société d'individus, il y a un égalisme positif et un égalisme négatif. Dans l'égalisme négatif, les gens se replient sur eux-même et sont inquiets, anxieux.

Les jeunes représentent un égalisme négatif avec une montée en force humanitaire. Avec la crise de la transmission, il y a méfiance envers les autres générations. Le refuge peut se trouver dans l'intime, la famille.

Trois autres crises s'ajoutent à celles du temps, de l'espace et de la normalité :celle touchant au domaine de l'état, de la famille et de l'industrie.

La crise étatique.

Elle est liée à la crise de l'état providence et à la crise de l'encadrement normatif voulu par l'état, c'est à dire,que les français acceptent de moins en moins ce qui vient d'en haut. C'est une volonté de l'individu de se soustraire du collectif.

Il y a volonté d'avoir une protection (mutuelle, assurance, acquis sociaux, etc) mais tout en se tenant à distance du collectif, en bref, avoir une protection collective que quand on en a besoin.

Il y a aspiration à se brancher et débrancher à volonté.

Notes de Michèle (sep 2009), article par Martine.

29 novembre 2008

Claude LEVI-STRAUSS

Sociologue, Ethnologue et philosophe, C. Lévi-Strauss fête ses 100 ans ce mois-ci.

Son expérience, ses découvertes, sa curiosité, nous ont fait découvrir d'autres cultures, d'autres modes de vie et il est intéressant de découvrir son regard aujourd'hui sur notre société.

Journal d'une étudiante (novembre 2008)... donner du sens...



Décidément le D.U., quelque soit la matière enseignée, par ses croisements, ses relations, ses échos durables allant d'un cours à l'autre occupent pas mal de ma pensée et alimentent (du moins je l'espère) ma réflexion.

Ainsi, c'est le centenaire de Claude LEVI-STRAUSS ! Grâce à Gérard NEYRAND, et son panorama de l'ethnologie et de la sociologie, j'ai eu envie d'aller à sa découverte : homme curieux, ouvert, humaniste, un homme que l'on aimerait rencontrer pour sa grande ouverture d'esprit et sa culture. Mais aussi pour aborder certains points douloureux comme une planète "en trop plein" de tout et notamment d'humains... dur dur !
Je dois partir pour les vacances de fin d'année à Paris. Le musée du Quai Branly offrait une journée spéciale pour la collection d'œuvres d'art de Lévi-Strauss le 28 Novembre 2008. J'aimerai bien y refaire un tour, si cette expo perdure, pour aller à la rencontre de ces objets et de ces cultures
"où toutes les rêveries de l'enfance se sont donnée rendez-vous, où des objets indéfinissables guettent le visiteur avec l'anxieuse fixité des visages" ...(1)




Le cours de Droit de la famille nous a montré et rappelé combien le Droit essaie de "coller" au mieux aux "réalités" des familles... Je trouve que, si des avancées sont certaines dans ce domaine, notamment sur la place de l'enfant et son statut au sein de la famille, il n'en va pas de même dans le quotidien et la prise en charge des enfants et des ados.
J'ai lu dans les ASH (2)les propos d'un éducateur, Damien Grethen, qui s'interrogeait ainsi sur la réelle prise en compte des difficultés de la population jeune aujourd'hui, constat que je partage et cette phrase m' a interpellée : "
"La nouvelle loi sur la protection de l'enfance ne porte pas bien son nom, elle fait la part belle aux parents au détriment des enfants..."
Ce sentiment est ressenti surtout quand il y a une multitude de "clignotants" mais qui restent isolés et non inscrits dans une réflexion globale. Trop souvent encore, la protection de l'enfance reste négligée, on colmate les brèches, on tente des expériences (placement, changement d'école, proposition de soins, etc...) Des fois ça marche... et des fois non.
Je constate moi aussi sur le terrain, ces "incasables" décrits dans le rapport de l'Observatoire National de l'enfance en danger (3), ces adolescents qui dérivent de plus en plus et se retrouvent marginalisés, oubliés, ignorés...
Quel devenir pour eux et pour notre société qui constate et ne fait rien... Et je m'inclus parfois moi aussi dans ce cycle infernal !
Ces éléments nous poussent à sortir des logiques institutionnelles. Ainsi D. Grethen note :
"Dés que des clignotants s'allument, il y a lieu de réunir l'ensemble des intervenants".

Et le rapport de l'ONED de rajouter :
"Les professionnels ne devraient pas s'interroger sur le sens du parcours mais aussi sur leur cohérence.
Les institutions continuent, au delà des incantations sur le partenariat, à fonctionner comme avant."

Bon, pour pas casser trop l'ambiance, des nouvelles du groupe : il s'agrandit encore, tant mieux : encore des filles, encore des A.S., décidément "penser le travail social" sur le terrain est exclusivement féminin ! Je blague évidemment, criez pas les mecs! (Coucou aux éducateurs qui bossent avec moi et avec qui on échange beaucoup sur ces questions).


Il est pas sympa ce groupe ?






La fac est pas mal non plus. Le samedi après-midi elle est beaucoup plus calme que le reste de la semaine. D'ailleurs on joue "les voitures balais", dés que nous partons le gardien nous emboîte le pas pour tout fermer à clef!

Les filles du C.G. 05 ont la chance d'avoir une voiture de fonction! Allez à la prochaine les filles !



(1) Libération du 28/11/08 article et photos de la "Lévi-Strauss Collector".
(2) ASH n°2582 du 21 novembre 2008 article "La prévention ne doit pas se faire au détriment des enfants".
(3) ASH n°2576 du 10 octobre 2008 : "Une souffrance maltraitée - Parcours et situations de vie de jeunes dits "incasables"" Chef de projet : Jean Yves Barreyre (sociologue) - Parrainé par l'ONED.

18 novembre 2008

Sociologie cours de Gérard NEYRAND . Approche sociologique de la famille.

L'axe sociologique s'inscrit dans la durée.
Evolution de la notion de "famille".

La famille nucléaire a eu une durée très courte; au 18ème siècle, 80% de la population française était paysanne. (région nord - famille traditionnelle; région centre sud – plus complexe, cohabitation de plusieurs noyaux familiaux.) Cela relativise l'idée de crise de la famille.
Famille: définition large (cousins oncles, etc) à restreinte (quelques personnes). Pour l'anthropologUe, le mariage est à l'origine de la famille.
La famille est centrée sur la vie en commun, dans un même logement; mais une
« famille » sans mariage, sans enfant, sans logement commun et même avec les parents séparés, reste une famille. le terme monoparental n'est pas correct, il faudrait dire « foyer monoparental ».

La trame de l'alliance doit se conformer à des règles, des prohibitions de mariage. On ne peut pas se marier dans sa famille d'origine. Pour qu'une famille se fonde, chaque famille accepte qu'un de ses membres se sépare. Il y a nécessité de communication entre famille pour un mariage.

Existe-t-il un modèle de famille à la base des sociétés humaines?
Non, il y a des règles de la parentalité, des liens de filiation, des liens comportementaux, sociaux, des alliances.
Les règles sont différentes selon les pays, les parents, etc...

Filiation: Reconnaissance de liens qui existent entre les individus :
Dans notre société la mémoire généalogique est très courte, 3-4 générations en moyenne. Dans d'autres sociétés il y a des ancêtres mythiques qui désignent les droits et les devoirs.
Filiation unilinéaire: on ne reconnaît pour parent que ceux qui descendent d'un seul parent. C'est la filiation patrilinéaire ou matrilinéaire. Dans ce lignage, il y a définition d'un clan.

Lignage: rapport religieux, économique, politique; rapport de parenté articulé sur rapport de lignage.(politique au sens de la gestion de la cité).
Dans une société matrilinéaire, l'homme qui est important est le frère de la mère;
Dans une société patrilinéaire, la femme déménage et vient vivre dans la maison du père de son époux.
Il y a transmission du nom, des biens, de privilèges...

La question importante est: « De qui est-on le fils? » d'où l'importance du mariage.

Dans notre société, la filiation est indifférenciée,cognatique. les règles d'alliance sont définies par le mariage.
Dans les systèmes élémentaires, les règles d'alliance donnent les interdictions et les prescriptions, dans les systèmes complexes, les règles d'alliance sont négatives, elles précisent qui on ne peut pas épouser.

Grandes diversités des formes familiales.
L'ordre social est inscrit dans une parenté incorporée, dans la conscience et le corps, c'est constitutif de l'individu.
(exemple dans certaines société cela amène à la réincarnation)
Les systèmes sont imbriqués avec les autres rapports sociaux, supports d'autre chose que d'eux-même. Parenté subordonnée à d'autres rapports sociaux, politique, économique, religieux. Il y a un effet de marquage des autres rapports sociaux.

Toute personne née avec une place non négociable se retrouve en position de « dette de vie » envers ses parents, sa société.
Prise de distance avec l'analyse structurale, par exemple avec GODELIER.
Certains exemples ne rentraient pas sur le modèle structurale, il y a eu évaluation de ses limites et contestation de l'œuvre de Lévi- Strauss.(immense anthropologue et père de la sociologie en France)
Il existe un lien entre des sociétés disparates. Cela remet en cause le caractère universel de l'échange des femmes et la domination masculine.
L'émergence de la pensée symbolique devait exiger que comme les paroles, les femmes s'échangent.(passage à la famille de l'homme). Les personnes échangées dans le cadre du mariage ne sont pas aliénées, elles gardent leur lignage. On cède le droit sur les personnes et non les personnes elles-mêmes. (droit sur sexualité, reproduction, etc) la comparaison avec l'échange économique n'est pas valable. La femme reste rattachée à son groupe familial avec ses droits et devoirs. L'échange se fait toujours avec les droits et devoirs.

Françoise HERITIER avance l'idée que l'identité de genre est plus fondamentale que l'identité de sang. Les rapports entre sexualité et pouvoir ont tendance à être repenser. La domination des hommes sur les femmes existe mais ce n'est pas le fondement de la parenté.
(sexe: référence biologique, genre: référence culturelle)
La sexualité est toujours prise dans d'autres rapports sociaux (politique, religieux, économique), il y a subordination d'un domaine de la vie sociale et non du sexe.
(corps sexué: machine ventriloque du social, quelque chose d'autre parle à travers le corps sexué. Chaque société a des mythes interprétatifs de l'ordre du monde. Dans notre société il y a le christianisme, Marie/Jésus.) Cela donne naissance a des phantasmes. La place du corps représente l'ordre social. (somatique)
On se tient selon un certain ordre social établi (code), l'ordre social s'inscrit dans le corps au delà du langage. (attitude)
Le corps est source d'évidence sociale et cosmique. Il y a incorporation du social.
Hexis corporelle: c'est la façon dont notre corps a intégré les codes sociaux;
Corps et psychanalyse: incorporation qui façonne ce que chacun a de plus secret.
En 1970, apparition de l'idée de l' « anti œdipe », questionnement du mythe freudien. Les théories globalisantes évoluent.
FREUD a toujours été en recherche, aussi, dans son oeuvre immense, il y a des contradictions. Féticher les théories de FREUD reviendrait à figer ses idées.
La socialisation du pulsionnel s'inscrit dans le corps. Il y a mentalisation de ce à quoi le corps est soumis.

Caractéristique de l'Homme: vit en société, est un produit de la société.
L'Homme a la capacité de se représenter de façon abstraite ses rapports à la société (réflexivité)d'où l'importance de la socialisation primaire, il y a mise en place de sa capacité à la représentation, à la mentalisation de son existence.

Notes de Michèle, 12 septembre 08.